Le sureau noir 7


Le printemps est maintenant bien installé. Au fil des jours et des semaines, les fleurs s’épanouissent à tour de rôles, offrant un paysage qui évolue chaque jour.
Après le lilas, on peut maintenant profiter pleinement des fleurs de sureau !

Ses fleurs blanches parfumées sont délicieuses pour préparer, entre autre, de nombreuses boissons… mais ce n’est pas sa seule utilité ! Laissez-moi vous présenter le Sambucus nigra : le sureau noir.

Les fleurs de sureau sont en corymbe ombelliforme. Elles sont blanches et leurs étamines regorgent de pollen.

Cet arbuste de la famille des Caprifoliacées (maintenant il parait qu’il faut dire Adoxacées…) a de nombreux surnoms, notamment « l’arbre aux sorcières »… Il est un bel exemple du ravage que peuvent faire les rumeurs tant il a souffert de sa mauvaise réputation !

Vue d’ensemble des arbres du fond du jardin, le sureau noir (en fleur à gauche) est un arbuste qui n’a pas à rougir de sa taille.

Le magnifique sureau qui trône dans mon jardin a d’ailleurs failli en être victime ! J’entends encore le cri d’effroi d’une amie, jardinière chevronnée, découvrant mon jeune sureau : « Arggg, un arbre aux sorcières ! ». Le temps de réaliser de quoi elle parlait (quelle pouvait bien être cette horreur dans mon jardin qui l’a mettait dans un tel émoi ?), elle me l’avait déjà tailladé à gros coup de sécateur… heureusement, le sureau noir est bien vigoureux, et 7 ans après cette anecdote, mon sureau est maintenant devenu un magnifique « arbre à poules » (oui, mes poules préfèrent dormir dedans que dans leur cabane…) qui ploie chaque année sous ses fleurs et ensuite ses fruits !

Heureusement depuis quelques années, cette mauvaise réputation tombe aux oubliettes… Mais d’où vient-elle ?

Dans l’antiquité, le sureau noir était pourtant connu pour de nombreux usages bénéfiques, voire même magiques chez les Gaulois. À l’arrivée de la chrétienté, Il est devenu « l’arbre de Judas » : il a été dit que l’ami de Jésus, ne supportant pas de l’avoir trahi, a utilisé cet arbuste pour accrocher la corde qui servit à son suicide… Pas mal comme rumeur pour discréditer une plante aux vertus magiques et par la même, diminuer la concurrence des religions païennes…

On l’a aussi accusé d’être une mauvaise herbe : étant commun des haies, mais surtout des zones proches des fermes et des habitations, tout comme l’ortie, « le Suzerain des Ruines », un de ses autres surnoms, était souvent considéré comme une mauvaise herbe envahissante qu’il fallait arracher. En fait, cela est tout simplement dû au fait que, tout comme l’ortie, il apprécie les terrains naturellement chargés d’azote. Poussant sur tous les sols, résistant aux maladies et assez rustique, il ne demande que peu de soins… voilà donc de quoi en faire une mauvaise herbe… Et s’il se dissémine ainsi partout, c’est tout simplement car les oiseaux sont très friands de ses baies… Une interaction entre espèces comme l’on en rencontre tant dans la nature : Le sureau nourrit les oiseaux et profite de leur envol pour envoyer sa descendance plus loin. Les oiseaux ne sont pas les seuls à apprécier le sureau, en témoigne le bourdonnement presque assourdissant des butineuses qui s’affairent lorsqu’il est en fleur !

On a aussi accusé le sureau noir d’être toxique ! « Mais c’est du poison » m’avait dit cette amie au sécateur facile pour se défendre de son crime… Et bien non, le sureau noir n’est pas du tout toxique, que du contraire ! Il est non seulement comestible mais peut aussi nous soigner.

En cuisine, on utilise ses fleurs et ses baies mûres dans de nombreuses recettes ! Ses fleurs dégagent un arôme enivrant qui se laisse facilement capturer, on le surnommait d’ailleurs « la vanille du pauvre », ce n’est pas anodin…

En médecine, on utilise cet arbuste depuis l’antiquité. Les baies noires, mais surtout les fleurs et l’écorce, sont utilisées en phytothérapie pour traiter différents maux comme la fièvre, les irritations buccales et les infections respiratoires responsables des rhumes, toux grasses, sinusites, grippes, etc. Le sureau possède également des propriétés diurétiques, laxatives, antirhumatismales, etc. N’hésitez pas à faire sécher ses fleurs pour profiter de ces bienfaits en infusion durant l’hiver (ou juste parce que c’est bon !).

Sa réputation d’empoisonneur lui vient de sa ressemblance avec d’autres sureaux.
En effet, on peut le confondre avec le sureau rouge (Sambucus racemosa) ou le sureau hièble (Sambucus ebelus). Si les baies du sureau noir sont comestibles, celles du sureau rouge ne le sont que si elles sont cuites, tandis que celles du sureau hièble sont toxiques et vous donneront une bonne colique…

Sambucus racemosa- le sureau rouge à des fruits rouge et la moelle brune.
Sambucus ebelus – Le sureau hièble est une herbacée.

Si vous consommez les baies du sureau noir, ne le faites toutefois que lorsqu’elles sont bien mûres, sinon vous risquez aussi de sérieux troubles digestifs, où alors bien cuites, les toxines responsables de ces troubles étant détruites par la chaleur. Les baies de sureaux rouges peuvent aussi être consommées, mais uniquement après cuisson, même si elles sont bien mûres.
Comme toujours donc, on ne consomme des plantes que si l’on est certain de leur identification et de leur utilisation !
Mais comment être certain que notre sureau est bien un sureau noir ?

Le sureau hièble est une plante herbacée. Il ne fait donc pas de bois comme notre sureau noir et disparait l’hiver. Ses tiges qui ne dépassent pas 2 mètres de haut ne seront jamais recouvertes d’écorce. Elles sont de couleur unie, verte, puis rouge et présentent un aspect nettement cannelé.
Les tiges du sureau noir sont différentes. S’agissant d’un arbuste, elles ne disparaissent pas l’hiver et le sureau peut mesurer jusqu’à 10 mètres de haut. On distingue nettement deux sortes de tiges sur les sureaux noirs. Les rameaux de l’année qui sont verts, ronds et lisses ; et comportent de très nombreuses lenticelles (inexistantes sur le sureau hièble). Dès la deuxième année les tiges boisées présentent une écorce de couleur « grise » avec des lenticelles très visibles. A l’intérieur des branches on y trouve une moelle très blanche dont la texture fait vraiment penser à du polystyrène…

Sureau hièble: sa tige n’est pas ligneuse.
La tige du sureau noir contient une moelle blanche.

Le sureau rouge quant à lui est aussi un arbuste et présente donc des tiges ligneuses. Pour le différencier du sureau noir, il suffit de regarder la couleur de ses baies, qui elles sont rouges. Lorsque l’arbre n’est pas en fruit, il faut alors regarder la couleur de la moelle de la tige ligneuse. La moelle du sureau noir est bien blanche, celle du sureau rouge est brunâtre.

Le sureau noir convient bien au jardin pour constituer des massifs, des haies naturelles… Si vous voulez l’accueillir au jardin, sachez qu’il préfère les sols riches et frais, mais il peut grandir dans n’importe quel type de sol tant que celui-ci n’est pas trop sec. Plantez-le au soleil ou à mi-ombre. Il n’a besoin d’aucun entretien. De surcroît, il se bouture facilement ; il suffit de planter une tige dans la terre en automne…
Une fois installé, vous pourrez profiter de ses nombreux bienfaits et même confectionner des flûtes avec vos enfants en utilisant le bois creux de ses jeunes rameaux, comme le faisait anciennement les druides.

Il vous sera aussi utile au jardin, en effet, les feuilles de sureau améliorent la formation de compost et permettent aussi la fabrication de purin de sureau utilisé pour faire fuir les rongeurs et les taupes, lutter contre les insectes ravageurs ( thrips, puceron, teigne du poireau, noctuelle, piéride du chou, altise) et même pour prévenir des maladies cryptogamiques (il est riche en sambucine).
Personnellement, je n’ai testé son efficacité au jardin que pour déloger des campagnols un peu trop envahissants, et quelques branches de sureaux plantés dans les taupinières ont suffit… C’était peut-être une coïncidence vous allez me dire, mais dans tous les cas, je reste accro à cet arbre avec lequel je prépare de délicieuses boissons, et en plus, les branches ainsi plantées se sont bouturées…

Allez, je ne vous laisse pas sans vous donner l’eau à la bouche avec deux recettes que j’ai testées et validées.

Recette du vin de sureau:

• 40 belles corymbes de sureau
• 250 g de sucre
• 2 l de vin blanc (je vous conseille un blanc Luxembourgeois, type Rivaner ou Riesling))

Récoltez vos 40 ombelles, le matin de préférence, puis secouez-les pour faire tomber les petits insectes qui pourraient être dessus. Idéalement, on ne lave pas les fleurs de sureau car elle perdrait une bonne partie de leur pollen et donc de leur goût 😉

Égrenez les fleurs de sureau, gardez le moins de tiges possibles car celles-ci donnent de l’amertume. Avec un peigne ça va plus vite ^^

Dans une casserole (ou tout autre récipient suffisamment grand que pour accueillir le breuvage, une dame-jeanne par exemple), mélangez bien le vin et le sucre jusqu’à dissolution complète de ce dernier.
Ajoutez les fleurs de sureau et remuez pour qu’elles trempent dans le mélange.

Recouvrez et laissez macérez dans un endroit frais pendant 3 jours en remuant de temps en temps.
Filtrez le vin et mettez en bouteille.
Dégustez frais avec modération (ou pas)!

Recette du sirop de sureau:

• 40 belles corymbes de sureau
• 2 citrons non traités
• 800 gr de sucre cristallisé
• 1 l d’eau

Récoltez et égrenez vos fleurs de sureau. Coupez les citrons en petits morceaux et mélangez-les aux fleurs.
Faites bouillir de l’eau avec le sucre. Quand l’eau est à ébullition, versez la préparation dedans et faites chauffer à feu doux 10 mn en remuant régulièrement.
Coupez le feu et laissez infuser toute la nuit.
Filtrez le sirop avant de le mettre en bouteille.
Vous pouvez utiliser le sirop de sureau pour agrémenter votre verre d’eau ou de vin, en nappage sur de la glace, un gâteau, ou de bien d’autres manières !

Et pour les baies, voici leurs utilisations et ma recette de sirop de baies de sureau.

Bon, je vous laisse, j’ai du vin à siroter ^^

Votre coach, Harmony.

PS: Vous voulez goûter tout ça et en savoir plus sur le bienfaits des arbres et arbustes de nos jardins? Inscrivez-vous à un des ateliers sur le sujet que je donne à Marneffe.


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